Concerts « live » sans public

Lise de la Salle et la Philharmonia de Zurich continuent la discographie initiée par Rachmaninov lui-même !

Lise de la Salle et la Philharmonie de Zurich. Photo : Monika Ritterhaus

Cette grande musique a entamé une longue histoire discographique, à commencer par l’intégrale de Rachmaninov lui-même (Naxos), qui a inspiré d’autres géants du piano dans des versions aussi innombrables qu’inoubliables. Citons Michelangeli, qui a gravé le quatrième concerto en stéréo en mars 1957 pour EMI, l’un des plus importants disques du piano de tous les temps, jamais retiré du catalogue !

Lise de la Salle possède toute la virtuosité, la dynamique, la passion, la fluidité et la souplesse qui traduisent parfaitement l’atmosphère rêveuse et nostalgique de la langue ô combien russe de Rachmaninov. L’artiste se lance avec spontanéité, possédée par le moment même de l’inspiration. Parfois, avec ses rubati extrêmes, la jeune interprète pousse la liberté musicale aux limites de la cohésion, rendant la structure quelque peu épisodique. Mais Fabio Luisi, partenaire idéal, reprend à chaque fois l’initiative en assurant la suite du discours. Le Philharmonia Zurich, soit l’orchestre de l’opéra, excelle dans tous les registres et offre des soli de toute beauté, même si les cordes semblent peu nombreuses pour une écriture symphonique d’une telle densité.

La qualité des enregistrements live varie : spacieuse et aérée dans le premier concerto – réalisé dans la Tonhalle, elle souffre d’une certaine épaisseur dans les autres, captés dans l’Opéra. Ici et là, l’image du piano vacille. La Rhapsodie sur un thème de Paganini, plus transparente, met en évidence les doigts brillants et l’élan époustouflant de la soliste.

Mais qui dit live, dit public ! Après de telles démonstrations, on n’a qu’une envie : entendre et « partager » la réaction du public. Déception! A cinq reprises, des silences aussi abrupts qu’assourdissants suivent les dernières mesures – de toute évidence des montages ! Eliminer les applaudissements gomme l’ambiance du concert. Néanmoins, ce beau coffret, avec la talentueuse Lise de la Salle, mérite sa place dans la discographie initiée il y a bientôt quatre-vingts ans par Rachmaninov lui-même !

Sergei Rachmaninov : Piano Concertos 1–4, Rhapsody on a Theme of Paganini. Lise de la Salle, Klavier; Philharmonia Zürich; Fabio Luisi, Leitung. Philharmonia Records PHR 0104 (3 CDs)

Cela peut également vous intéresser.