Sonate pour piano n° 18 « La Chasse »
Chacque vendredi, Beethoven est ici. Pour le 250e anniversaire de la naissance de Beethoven, la Revue Musicale Suisse jettera chaque semaine un œil sur une œuvre différente de son catalogue. Aujourd’hui pour la sonate pour piano n° 18 en mi bémol majeur op. 31/3 « La Chasse ».
Après avoir écrit le « Testament de Heiligenstadt » où ses inquiétudes concernant la perte progressive de l’audition, son isolement social et ses pensées suicidaires avaient atteint un point culminant et fait office de catharsis (il s’agit d’une lettre à ses deux frères écrite le 6 octobre 1802, mais jamais envoyée), Beethoven a entamé un nouveau processus créatif. C’est ainsi que, selon les souvenirs de Carl Czerny, il avoue à son ami Wenzel Krumpholtz : « Je ne suis pas satisfait de mon travail précédent. A partir de maintenant, je veux innover ». Czerny avait déjà fait référence à cette déclaration au sujet des Sonates pour piano op. 31, dans lesquelles Beethoven avait revisité le genre. Cela ne s’applique pas seulement à la Sonate La tempête (op. 31/2), mais aussi à la Sonate en sol majeur (op. 31/1), toutes deux publiées en avril 1803 par Hans Georg Nägeli à Zurich dans le tome 5 du Répertoire des Clavicinistes. Ce n’est qu’en novembre 1804 que suivit la Sonate en mi bémol majeur, op. 31/3, dans le volume 11, avec une réimpression de la Pathétique op. 13, car Beethoven n’avait pas livré la quatrième sonate que Nägeli attendait. – Au passage, le Répertoire des Clavicinistes constitue le pendant moderne de la série Musikalische Kunstwerke in der strengen Schreibart (œuvres musicales d’écriture stricte) que Nägeli avait lancée avec le Clavier bien tempéré.
Avec Clementi, Cramer, Dussek et Steibelt, les sonates de Beethoven étaient en excellente compagnie. Le niveau musical de la série était élevé, comme le dit une publicité publiée à diverses occasions : « Tout d’abord, je m’intéresse aux solos de piano dans un beau style, de grande ampleur, dans diverses variations de la forme sonate habituelle. Ces partitions doivent être caractérisées par leur soin du détail, leur richesse, leur plénitude ». L’édition a été imprimée à Paris, de sorte que les courriers vers Vienne étaient trop éloignés et trop lents pour permettre une correction correcte. Les sonates de Beethoven ont ainsi été publiées avec de nombreuses erreurs, l’opus 31/1 même avec une insertion non validée de quatre mesures. Beethoven a réagi avec mécontentement et, peu de temps après, il a commandé une nouvelle édition chez Simrock à Bonn avec l’ajout : « Edition tres Correcte » (en français dans le texte).
Ces trois œuvres sont inhabituelles. Dans l’opus 31/3, après toute une série d’expérimentations autour de la structure, Beethoven reprend l’organisation en quatre mouvements – qu’il n’utilisera plus jusqu’à la sonate Hammerklavier op. 106. Toutefois, il ne tient pas compte de l’ordre habituel des deux mouvements intermédiaires. De plus, les caractéristiques musicales du mouvement lent et du mouvement de danse sont appariées, entrelacées, échangées et pourtant mises en opposition : en deuxième position figure un scherzo merveilleusement sonore, souvent au registre baryton, en 2/4 (Allegretto vivace). Il est suivi d’un menuetto à l’ancienne, au tempo plus calme, en 3/4 (Moderato e grazioso). Le début du premier mouvement est également ambigu : ce qui semble de prime abord une introduction au tempo modéré s’avère devenir le thème principal du mouvement. Selon Carl Czerny, le brillant final, qui mesure avec virtuosité l’ambitus du piano, remonte à une improvisation où Beethoven avait « vu un cavalier galoper devant sa fenêtre ». Au vu du tempo Presto con fuoco et des étonnantes évasions harmoniques, il devait s’agir plutôt d’une course folle.
Aufnahme auf idagio
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